La Camera Obscura de Béjar
…simple prétexte à quelques balades dans ce coin d’Espagne…
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par JChris d'Urbanbike
Parenthèse : en décidant de me déconnecter quelques jours de Twitter1, je prends — à nouveau — conscience de mon addiction aux news en mode télégraphique mais également que je peux aisément retrouver du temps en m’en détachant durant un long week-end… Voire plus.
En quittant Salamanca et en se dirigeant plein sud vers Cáceres, bien avant Plasencia, il y a Béjar2 puis la Puerta de Béjar qui tutoie les 1000 mètres d’altitude.
Nous nous y étions jamais arrêtés jusqu’à présent quand nous descendions à Cáceres ou remontions de Sevilla.
Mais, il y a quelques semaines, nous avons décidé de nous rendre au Monastère de Yuste pour découvrir l’endroit où Charles Quint — alias Carlos V ou encore Carlos I de España — en pleine possession de ses moyens, encore jeune, a décidé de se retirer après avoir renoncé à la couronne et à ses privilèges.
Cette envie nous est venue après une passionnante visite de l’Alcazar de Sevilla conduite par notre guide francophone, Marina3. C’est elle qui nous a fait découvrir les acteurs de ce gaspacho architectural — pour reprendre ses termes — en évoquant tant Carlos V que Pedro 1er. Et donc la retraite de Charles Quint au Monasterio de San Jerónimo de Yuste.
N’oubliez pas le relief…!
Depuis Salamanca, la distance vers Yuste, à vol d’oiseau, n’est que de 95 kilomètres mais, en réalité, il faut en parcourir plus de 170…!
Pourquoi ?
Les reliefs montagneux d’Espagne, et particulièrement en Castilla y León comme en Extremadura — n’hésitez pas à zoomer dans cette carte référencée qui est l’œuvre de l’IGN espagnole — nous obligent à emprunter la Ruta de la Plata (…désormais, c’est une autoroute gratuite et confortable) pour descendre jusqu’à Plasencia, histoire de contourner quelques Sierras encore enneigées en cette saison …avant de remonter ensuite au …nord-est vers Cuacos de Yuste.
Plasencia avec ses chênes liège est l’indispensable étape d’autant qu’il n’y a pas de réseau routier hyper étendu par ici et l’usage de véhicules 4x4 souvent indispensable4 dès lors que l’on quitte les principaux itinéraires.
On oublie trop souvent qu’il y a de sacrés reliefs en Espagne. Salamanca est à 798 mètres d’altitude (sur un gigantesque plateau), Plasencia n’est qu’à 406, Béjar entre les deux à 953 ! Tout comme cette image d’Épinal d’une Espagne aux températures torrides. C’est vrai (!!) mais parfois avec de sacrées amplitudes ! De -12° à + 30° annuellement à Salamanca. Ces derniers mois, il était courant d’avoir une température négative le matin et se retrouver à 20° l’après-midi. Et avec le réchauffement climatique et la sécheresse qui se déploie, pas fini d’encaisser ces amplitudes. D’ailleurs, pas de neige cette année à Salamanca, que de la neige fondue sous forme de pluie…
Yuste
Le Monasterio de San Jerónimo de Yuste est situé à quelques kilomètres à l’ouest de Cuacos et mérite amplement le détour et ces 170 kilomètres parcourus…
Cadre architectural splendide (rappel, les photos sont interdites dans tous les sites du patrimoine national espagnol), on comprend pourquoi Charles Quint s’est retiré ici en se baladant dans les deux patios, en appréciant les vues sur le paysage environnant qu’il avait depuis ses appartements.
Ce roi y est mort à plus de 58 ans après une vie particulièrement remplie mais usé par une maladie insidieuse, la goutte. D’ailleurs, on peut voir un fauteuil spécialement étudié dans ses appartements.
Sans oublier un sentiment de tristesse après avoir perdu son épouse, Isabel de Portugal dont il était réellement amoureux et dont un tableau peint par le Titien était accroché dans ses appartements à Yuste — tableau désormais au Musée du Prado.
Depuis Yuste (519 mètres), nous avons poursuivi notre route jusqu’à Guijo de Santa Bárbara, au nord de l’Estrémadure pour y passer une nuit fraîche et paisible à …876 mètres d’altitude5.
L’occasion de rappeler qu’il existe nombre de piscines naturelles au pied des sierras (de fait, des torrents dont des rétrécissements et donc des retenues d’eau artificielles ont été créés par la main de l’homme) qui sont autant de lieux de baignade dès que les températures partent en flèche…!
On en trouve à 200 mètres à pied de Guijo de Santa Bárbara ou encore non loin de Cuacos de Yuste, le Lago indiqué étant une imposante plage artificielle avec restaurants, parkings, campings…
Béjar
Le lendemain, nous avons fait la route en sens inverse, revu les allées bordées de palmiers de Torremenga, puis après être repassés par Plasencia, remis le cap au nord avant de nous arrêter enfin à Béjar.
Notre but restait de découvrir Candelario qui se situe plus haut à 1136 mètres d’altitude.
C’est en nous rendant au palais ducal de Béjar que nous sommes tombés sur l’ancêtre de Big Brother !
Si internet est un outil fabuleux, parfois le hasard permet parfois de découvrir un point non (encore…!) signalé dans Wikipedia par exemple.
Et, ici, il s’agit d’une Camera obscura réinstallée (…ça se discute) à son emplacement d’origine en 2010, sur l’une des tours du palais ducal6.
D’ailleurs, pour vous en convaincre, jetez un œil sur les photos du palais dans Wikipedia et sur celles qui suivent…! Il manque cette excroissance qui permet de surveiller la vallée.
Bon, en cherchant avec les bons mots clés camera obscura béjar
, vous tombez sur une série de liens en espagnol. Dont le plus intéressant est bien entendu en espagnol mais également disponible en français, et un rappel historique de 4 pages au format PDF. Et pour cause, c’est l’entreprise qui réinstalle ces chambres noires.
Bref, nous ne savons pas si cette Camera Obscura existait précédemment mais l’expérience que nous avons vécu pendant près de 30 minutes à Béjar était renversant (à tous points de vue !).
D’autant que nous avons pu détailler le relief environnant sur 360°, suivre tant les voitures, cyclistes, joggeurs que des oiseaux et se rendre compte que l’on peut ajuster sans problème le focus pour jouer sur la netteté.
Et ceci à l’insu bien entendu des personnes observées lors de cette épatante démonstration optique.
Bref, si vous passez dans le coin un week-end, que le temps est convenable, c’est à tester.
Puis n’hésitez pas à monter encore jusqu’à Candelario qui se situe 150 mètres plus haut et à vous perdre dans ce village.
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d’autant que je peux nourrir mon compte sans me rendre sur Twitter. Il ne s’agit pas de quitter ce réseau mais juste de faire une cure au lieu de succomber à une crise d’infobésité…! ↩︎
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rien à voir avec Maurice… Désolé. ↩︎
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si intéressé, me contacter pour obtenir ses coordonnées. ↩︎
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entre les routes en réfection et l’absence même de revêtement dès que l’on s’écarte de voies balisées, les fortes inclinaisons de la chaussée, disposer d’un véhicule un peu rustique n’est pas un luxe. ↩︎
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si ce village est peu habité (toujours intéressant également d’avoir en tête la topographie et la carte de la densité de la population espagnole), nous sommes tombés sur un producteur de mermeladas artesanas — le site est encore en construction vu que le WordPress est de fin avril 2019 (!!) — avec des produits épatants dont une de poivrons particulièrement bien équilibrée. ↩︎
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Une chance est que c’était bien ouvert ce dimanche (que… Viernes – Sábados y Domingos : de 11 a 14 horas) et manipulé de main de maître(sse…!) par une opératrice compétente et passionnante. ↩︎