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Du bistrot à la brasserie…

Nouveau propriétaire, nouvelle carte

dans mémoire | usages | vieillir
par Jean-Christophe Courte

Nous avons tous vécu la perte d’un bar de quartier, lieu habituel de rendez-vous où l’on se retrouvait, où l’on était reconnu et, accessoirement, où l’on déjeunerait…

Et puis un jour, l’enseigne change, les patrons également…

J’ai vécu cela plusieurs fois mais particulièrement…
Au bar de la Marine en face de La Bruyère.
Puis au Ver Luisant entre Concorde et Vendôme.
Deux lieux populaires, animés, vivants.

Quand j’étais en terminale (prescription…!), je croisais aux aurores (je suis devenu un lève tôt en pension) les chauffeurs de la SERNAM (…qui démarraient au verre de blanc cassis et tartine camembert beurre…!), quelques postiers, les boueux qui laissaient leur camion-benne à l’angle de la rue de Noailles. Et les premiers lycéens.

Le second à Paris chez Juliette et Pierre.
On y croisait tous ceux qui bossaient rue du Mont-Thabor entre la rue Cambon et la rue de Castiglione : en gros, le personnel des grands hôtels, les techniciens photo de Rainbow Color, les copains opticiens de chez Meyrowitz. Sans oublier une flopée d’employés de bureau, coiffeurs, modistes, imprimeurs, serruriers.
Et nous.

Au Ver Luisant, on se faufilait le matin entre les tables et le bar ; Pierre jouait du percolateur dès 06:30 pour servir des cafés tout en nous passant le journal.
Le midi, il fallait impérativement arriver de bonne heure (ou revenir une heure plus tard) pour consommer le plat du jour mitonné par Juliette dans sa cuisine.

De table en table, les discussions se croisaient comme les paniers de pain et les carafes d’eau. J’ai particulièrement apprécié cette convivialité pendant des années. Même nos clients venaient s’encanailler (!), tombaient la veste. Tout le monde se connaissait, l’ambiance était superbe, Juliette et sa serveuse (…trou de mémoire, je n’arrive par à retrouver son prénom… Paulette, Pauline ?) officiaient avec leur autorité naturelle, les occasions de blaguer nombreuses.

Quid du Petit Bar dans la même rue mais plus à l’Est après le sublime Kinugawa, un bistro tenu par des personnes de l’Allier, une ambiance familiale (dernier passage avec Yvon en juin 2018). Il est encore ouvert, une rareté dans Paris…

Quasi même topo dans un restaurant plus coté à l’angle de la rue de Mondovi et à l’Ouest de la rue du Mont-Thabor, Lescure, malheureusement fermé.
Tenu par un couple attentif (…troisième génération dans ce lieu ouvert en 1919), deux commis officiant en direct dans la cuisine ouverte sous le regard des clients.
Et un service épatant (…André imperturbable et son alter ego au regard triste…) pour nous caser, servir à bout de bras les assiettes de confits de canard du Périgord – à la bonne franquette – dans un espace exigu, parfois autour de la table d’hôte où nous étions au coude à coude avec des inconnus avec qui le contact se faisait naturellement. Ou sur la terrasse l’été.
Terminé…

Changement d’ambiance…

En 2010 (?), Pierre et Juliette ont pris leur retraite et cet espace est devenu un banal estaminet, l’esprit du lieu s’est évaporé.
Notre imprimerie de ville est devenue un café…!

Les français sont sensibles à ces tiers lieux1 qui ne sont pas que des endroits pour se nourrir.

Je raconte tout ceci parce que c’est ce que je ressens avec… Twitter…!
La précédente équipe avait certes des défauts (et une dette colossale) mais le lieu était en partie tenu, même que l’oncle raciste avait fini par être débarqué.

Et puis la nouvelle équipe est arrivée après une acquisition stratosphérique2, commence à changer le mobilier, la carte.
Et souhaite imposer sa marque et de nouveaux tarifs3

Or une clientèle n’est jamais totalement captive : une petite partie cherchera, tôt ou tard, à retrouver ailleurs cette convivialité perdue.

reduc-450

Ici, rue Vasselot à Rennes le 4 octobre…

le 02/11/2022 à 07:00 | .(JavaScript must be enabled to view this email address) à Jean-Christophe Courte | #